25.8.16

Zulu


« …personne ne vous entendra crier. »

And he told us of his life, In the land of submarines.

"Et si on cherchait des trésors au fond de la mer ?" Voilà la phrase sybilline lâchée il y a 3 ans de cela par un jeune nippon à son père en mal d'inspiration ludique. Jun Sasaki, le papa, est déjà le patron/créateur/designer de Oink Games et cherche alors une nouvelle idée de jeu, et son fils de 6 ans vient de poser les bases de ce qui va devenir Kaitei Tanken, Deep Sea Adventure sous nos contrées occidentales.

C'est donc dans la peau, et le néoprène, de quelques plongeurs sans le sou que Deep Sea va vous permettre de vous glisser. Unis par la seule idée que les grands fonds doivent receler fortunes et richesses insoupçonnées, vous, explorateurs, avez réunis un maigre pécule pour vous offrir un joli petit sous-marin bleu, boat sweet boat de location, ainsi qu'une seule et unique réserve d'oxygène, ce qui, avouons-le maintenant, n'était pas l'idée de la décennie lorsqu'il s'agit de damer l'meeple de ses concurrents ! Ne reste plus désormais qu'à faire au mieux pour remonter vos trésors à la surface avant que l'un de vos petits camarades tout de caoutchouc vêtu ne vous aspire la dernière bulle.

En vague résonance, L'horizon déraisonne, Le souffle coupé je comprends.

Dans Deep Sea Adventure, 2 à 6 joueurs vont donc devoir effectuer 3 plongées pour ramener des trésors dont la valeur augmente tout au long des quatre paliers que constituent la ligne de ruines : le premier se compose de jetons ayant une valeur de 0 à 3 points, le second de 4 à 7, puis 8 à 11, pour finir, ô ivresse des profondeurs, de 12 à 15 points, chaque jeton existant en double exemplaire. Chacune de ces 3 manches n'autorise qu'une remontée et se termine lorsque la sacro-sainte bombonne est vide de ses 25 unités d'air. A l'issue de ces sorties, le barboteur le plus riche l'emporte.

Lors d'une plongée, le scaphandrier doit d'abord décider s'il continue de descendre ou s'il préfère amorcer sa remontée puis, il jette 2 dés (faces numérotées de 1 à 3) lui permettant d'avancer d'autant de cases que le résultat obtenu, avec pour particularité qu'une case occupée par un autre plongeur est simplement évitée : une bonne manière d'amalgamer deux dictons pour en conclure qu'"on n'colle pas ses oeufs de crabes dans l'même panier" !

Une fois arrivé à destination, l'homme grenouille peut choisir de ne rien faire d'autre que tailler un filet avec la faune locale en attendant son prochain tour, fouiller furieusement les ruines en s'adjugeant le pion sur lequel il se trouve, sans le retourner et en le remplaçant par un jeton d'emplacement vide ou, s'il se trouve encombré et sur ce même jeton d'emplacement libre, prendre l'option de se délester de l'une de ses précieuses découvertes. Mais l'oxygène dans tout ça ?
Sa consommation ne commence en fait que lorsqu'un joueur décide de ramasser un trésor : dès lors, à son tour, le nombre de pions transportés diminue d'autant la réserve d'air commune, et son jet de mouvement personnel, compliquant la remontée.

En fin de manche, lorsque la dernière bulle a été goulument aspirée, soit votre nageur est sauf et à bord de son frêle esquif, auquel cas il retourne ses pions pour connaître la valeur du magot remonté à la surface, soit il nourrit Dory, Nemo et cie, et son chargement tout entier rejoint les profondeurs de la piste des ruines, avec pour particularité que les pions s'y entassent par trois mais ne comptent que pour un trésor pour la plongée suivante. On enlève ensuite les jetons blancs, et une nouvelle équipe de plongeurs s'y recolle.

Always lost in the sea

Découvert via une news juilletiste, puis une vidéo, du Dr Mops, spécialiste es-titres japonais du site Tric Trac, j'ai tout autant été séduit, sans Jacques, par cette perle ludique que par sa coquille. Car oui, les velléités du créateur de ne pas facilement céder les droits de ses bébés à l'export pour en conserver l'authenticité et le concept initial se comprend d'autant mieux que d'aucun trouvera le game design de Deep Sea pour le moins minimaliste et particulier. A mes yeux d'occidental, il est surtout définitivement japonais !
Classieux et très en phase avec les choix graphiques originaux des productions Oink Games, avoir un exemplaire de Deep Sea Adventure en main, c'est aussi posséder un bel objet. Ainsi, dans une toute petite boîte d'un joli bleu canard... laqué (C'est pour le côté asiatique ? Rudement bien fichue cet comm' !), le matériel est certes sommaire, mais de qualité : avec ses 6 meeples scaphandriers au hublot bien visible, un sous-marin stylisé, des jetons aux formes géométriques simples et au carton épais, le tout se déclinant sur des tons azurés du plus bel effet, l'installation d'une partie est toujours un plaisir pour le joueur néophyte.

Mais qu'en est-il du plaisir ludique ? Pour rester dans le thème, très présent à mesure que la jauge d'oxygène diminue, Deep Sea peut se résumer à 3 inspirations. Une rapide et insouciante, coopérativement anecdotique, où le plongeur et ses "amis" peuvent décider de poursuivre la descente pour aller voir là-bas, tout au fond, si les trésors y sont plus brillants puisqu'il ne s'agit que d'exploration, non !? Une lente et profonde, sérieuse, réfléchie, lorsque l'on goguenarde pour, au bon moment, tourner cas(a)que, se charger de richesse et laisser ses anciens camarades s'enfoncer dans d'insondables abysses, histoire discuter avec ce bon vieux Leonardo (pas la tortue masquée, malgré l'environnement !). Et enfin, une avide et paniquée, souvent l'ultime, à mesure que la coque du submersible s'éloigne au rythme des petites bulles d'air avidement goinfrées par le poids incommensurable que l'avidité sur nos épaules a chargé, et nos détestables concurrents déjà de retour dans leurs confortables cabines.

Sur la mécanique proprement dite, on est en plein dans l'aléatoire du jet de dés, mais il est fortement et bien heureusement influencé du stop ou encore de poursuivre sa descente, de ramasser, voire de déposer ses possessions trésors pour, d'une part, progresser correctement et crever la surface, et de l'autre, bouffer l'oxygène du retardataire, plaisir incommensurable de voir ces petits corps plastifiés s'offrir en Malabar goût viande aux grands blancs de passage. Car oui, le sel de vos larmes souvent se noiera dans celui de l'amère désillusion de l'échec.

Au fil des parties, rapides, le plaisir demeure le même et, côté ambiance, on ne chambre pas que pour la décompression : c'est pourquoi ce petit sous-marin et ses occupants ne m'ont quasiment pas quitté des vacances et m'accompagnent dans la plupart de mes déplacements. Deep Sea Adventure, qui tient dans la main, qui tient dans la main, offre donc une jolie palette d'émotions à la Picasso (plutôt période bleue !) pour peu que vous vous colliez la tête sous l'eau fortement thématique du jeu et que l'incertitude cubique ne soit votre Némésis ludique.

Du coup, et fort logiquement, "dès que le vent soufflera, je repartira"... pour une petite partie !

22.5.16

Pur Week-End - épisode 3 et fin... définitive ?


« I can't stop dreaming, Do you know what I'm in. »

Dimanche ! L'oeil vif et le pas hagard... ou était-ce l'inverse... nous pénétrions un peu plus tôt que la veille sous les toits métalliques et diablement coûteux du parc Expo', pour les quatre heures que comptaient encore le salon.

Notre trio nous privant de la joie de nous essayer à l'extension de 7 Wonders Duel (long cri d'agonie dans ma tête, des restes de Route 666 probablement), je cherchais vainement un petit espace pour poser mon mignon séant, et accessoirement le leur, beaucoup moins joli il est vrai: malheureusement, ni les tables de Dice Forge de Libellud et son système à dés "lego" dont on m'avait dit le plus grand bien - ce qui n'était pas forcément le cas du fond du jeu, d'où mon envie de me faire un avis propre... ou sale - ni les bois du pont d'un des langskips de Vikings on Board chez Blue Orange - histoire que je dévoile mes nombreux points communs avec le magnétique Travis Fimmel et tapote le crâne de mes suivants à petits coups mesurés de danaxe -, ni l'un ni l'autre donc ne désemplissaient. Aussi, baguenaudant d'un stand à l'autre, nous finîmes par aller saluer les copains de la veille, Henri et Sylvain...

Et là, ô surprise, il s'avère que le sieur Molliné avait sorti un proto évoqué le jour précédent, à savoir Slaughter Monster (2 à 4 joueurs pour 1 heure et moins), toujours chez Ankama : ni une ni deux, mais plutôt à six, nos fesses épousèrent rapidement des chaises déjà rencontrées !

Slaughter Monster

Jeu de commande du big boss d'Ankama lui-même, apparemment grand fan de jeux de plateaux et probablement désireux de sortir des enclaves Dofus et Wakfu, SM (l'acronyme qui va bien !) vise clairement le genre horreur à tendance teenagers : aussi, Henri a-t-il du "bouffer" en pagaille du slash movie, du pire au meilleur, afin de bien s'imprégner de l'ambiance particulière de ce type d'univers. Et dès la présentation du jeu, cela se ressent : on y retrouve la bimbo un brin violente, la mignonne sans cervelle, le noir de service à l'espérance de vie raccourcie, le sportif possédant deux cerveaux et un muscle et, enfin, le has-been à la chemise défraîchie et au cheveux gras. Caricatural certes, mais on ne peut plus collé à la réalité du sujet ! Ne reste donc plus qu'à voir comment ce petit monde va survivre, hein ? non ? Ah oui, j'ai oublié de préciser une chose... importante : ici, le joueur incarne une famille de monstres clairement en appétit, peu allergique à la consommation de tissus tant qu'il y a d'la viande dedans... et comme en plus, c'est la pleine lune. A table ! :D

Dans une boîte, espace de jeu figurant la maison avec murs modulables et portes mobiles, cerclée par le plateau représentant les extérieurs, le but pour nos loups-garous, vampires, golems et autres zombies va donc être de grailler du jeune pubère. Mais puisque nous sommes dans un film à codes, nous allons commencer par choisir chacun secrètement un ordre de trépas pour ces repas sur pattes : tout le sel du jeu va donc être, pour maximiser ses points de victoire, de faire tomber ces chères petites têtes blondes selon sa macabre chronologie propre. En attendant d'être dégusté, chaque personnage se dissimule donc dans une des cinq pièces d'un vieille piaule décrépie : une carte ado' est placée au milieu d'autres objets dans une pioche liée, qui à la cuisine, qui au salon, qui à la chambre, qui aux toilettes ou qui à l'entrée. Histoire de prolonger leur espérance de vie, chaque humain possède un certain nombre de points de vie, et une capacité spéciale propre à une pièce en particulier. Côté joueurs et donc bestioles peu ragoutantes, le père, la mère et le fils de chaque famille, en plus de leur pouvoir de "race", sont définis par leur points de... mort ?, leur nombre d'actions possibles et leur puissance d'attaque.

La partie se déroule durant une nuit... de pleine lune : à chaque heure, son tour de jeu et son évènement aléatoire, et à chaque tour, l'activation d' un seul des membres de sa famille jusqu'à les avoir tous jouer après trois heures. On reprend alors l'intégralité de sa troupe en main, et ce trois fois de suite jusqu'au petit matin. Côtés actions, outre un déplacement gratuit personnifié par le placement de sa figurine dans une pièce de la maison, à son tour, votre monstre se voit offert 3 choix distincts, chacun basé sur une caractéristique et un nombre de dés équivalents.
- scruter et regarder par le trou de la serrure ou des planches disjointes la première carte d'une pioche d'une pièce adjacente, avec la chance de peut-être y apercevoir une blondinette, auquel cas sa figurine est placée dans la pièce correspondante.
- fouiller dans sa pièce et récupérer les cartes de sa pioche voire découvrir un bête sportif, et dans ce cas, là encore, le faire apparaître physiquement.
 - gratter, casser une porte ou effrayer le has-been de base auquel cas il se barrera fissa des lieux pour se dissimuler dans le paquet d'une autre pièce, sa figurine disparaissant alors du plateau.
La dernière action est de gentiment taper sur le souper... pour l'attendrir : en cas de réussite, on y
gagne des gouttes de sang, deux par blessures, un cerveau à trois points s'il meurt dans d'atroces souffrances... et surtout dans la position initialement choisie, et même 4 kilos de barbaque et points représentés par un jambon, s'il meurt de vos griffes/crocs/haleine, à poing nommé ! :) La viande n'étant déceptivement plus ce qu'elle était, le repas se montre souvent récalcitrant. Il faut dire que vos cousins et adversaires maléfiques vont probablement aider votre nourriture désignée à l'aide des objets cachés dans les pioches de chaque pièce : l'ordre des décès étant vital à votre victoire, il faut en effet s'arranger pour soutenir les futures victimes le temps qu'elles se jettent dans vos propres crocs, et dans le bon ordre s'il vous plaît. Du coup, et d'expérience, la cheerleader est bien moins comestible lorsqu'elle s'accompagne d'une tronçonneuse : c'la peut même provoquer des ulcères...

Encore un peu dans son jus, tout comme moi au bout d'une énième défaite, SM connaîtra probablement quelques retouches dans les mois à venir, mais sa base est solide. Cartes, dés, plateau/boîte évolutifs (les salles dans la boîte sont modulables pour une centaine de config' différentes), possibilités de rajout d'évènements, victimes et bourreaux, et donc figurines, font que le tout matche bien : visuellement, le thème en est renforcé, et ce n'est pas au détriment de la mécanique. Sur le premier point, Henri et Ankama savent d'ailleurs ce qu'ils veulent : des matériaux de qualité et de la figurine qui envoient du bois... Du coup, dans la discussion, ont été évoqué les mots KS et CMoN... sources d'accélération salivaire chez moi, tant l'association avec Ankama pourrait alors donner lieu à un petit bijou graphique.

En conclusion, même si je ne suis pas un inconditionnel du "tout hasard", avec l'impossibilité d'influer sur ses jets de dés, j'ai vraiment hâte de découvrir les futures évolutions de MS, et sur son système, et sur son visuel !

Il nous restait alors un peu plus d'une heure avant la fermeture : nous saluâmes une avant dernière fois Sylvain et Henri, les remerciant pour leur accueil et leur bonne humeur, denrée précieuse dans ces métiers de contact que je pratique et apprécie tant. Pendant ce temps-là, Libellud rangeait ses tables tandis que Blue Orange n'en finissait plus d'aligner ses boucliers. C'est alors par un certain Hugo, stagiaire rennais, que vint notre salut.

Playad Games est un éditeur breton né de l'envie de quatre passionnés de sortir tout d'abord un jeu, et puis l'expérience fonctionnant, de continuer sur cette voie. Xavier Berret, déjà patron de L'Heure du jeu à Rennes, est l'un d'entre eux, et avait fait le trajet pour venir présenter le tout beau Million Club (2 à 6 joueurs pour 15 minutes par joueur), créé par Arnaud Ladagnous.

Million Club

Je précise tout d'abord que je dis tout beau car c'est Pascal Quidault, déjà coupable sur Splendor et Time Stories, et bientôt Hit Ze Road, qui illustre ici... et que c'est à peu près la seule chose qui m'attirait jusque là dans ce jeu. Je n'sais pas pourquoi, mais incarner un baron de la finance, même en pleine révolution industrielle, ne m'enchantait guère. Dans le même ordre d'idée, malgré la qualité d'un matériel plutôt joli, ces quelques meeples, ces 5 roues et ces nombreuses cartes ne m'inspiraient pas plus que cela. Mais nous voulions jouer et tester, et c'est donc souriants que nous nous assîmes à la table de rennais qui ne l'étaient pas moins.

Tout au long des 9 manches que dure la partie, les joueurs tentent de construire un empire économique par la collaboration et les lobbies, ou par l'affrontement grâce aux intrigues et autres jeux boursiers. Au fil des tours, on se rend donc acquéreur de trois types de sociétés (industries, transports ou ressources) que l'on fait fructifier en agissant sur les cinq sphères d'influences que sont les milieux du lobby, pour augmenter ou diminuer des valeurs de sociétés, des intrigues pour agir dans l'omble et influer son jeu ou celui de ses concurrents, des colonies pour acquérir quelque comptoirs internationaux, de la bourse pour changer ses valeurs d'actions en monnaies sonnantes et trébuchantes voire effectuer une OPA chez un voisin, et des sociétés pour acquérir de nouvelles entreprises. On pose alors ses deux meeples sur une ou plusieurs de ces tuiles pour les activer, en sachant qu'une d'entre elle est neutralisée pour tous à chaque tour : une majorité de pose apporte bien entendu un bonus non négligeable lors de son activation. Au moment du décompte final, le nombre de sociétés et de comptoirs possédés, leurs diversités, l'argent, et bien entendu les valeurs boursières décident de qui remporte le pactole.

Le vrai plaisir du jeu, outre les typiques gestions de développement, de majorité et de pose d'ouvriers, vient bien de son ambiance très liée à sa mécanique. On ne peut passer une partie en autarcie et une réelle interaction est nécessaire entre chaque capitaine d'industrie, les cours boursiers influant aussi bien sur ses sociétés que celles de la concurrence... Tout cela pourrait sembler compliqué, voire abscons en terme lexical, mais le jeu tourne remarquablement bien et après une partie, on en a saisi les mécanismes : Million Club est donc un jeu simple d'accès mais dont la profondeur est plus que prometteuse.

Alors voilà, le jeu est bon, c'est certain. Son matériel colle au thème, c'est une évidence. Mais l'achèterai-je pour autant, cela reste à voir car le jeu ne m'a pas, moi, totalement séduit. Dans le genre "économique" mais avec une mécanique bien différente, je lui préfère, et de loin, Mombasa, dont je parlerai probablement un jour, ici, un jour... Reste qu'en bons requins des finances, nous nous sommes mangés entre nous sur cette session, laissant Marie sur une belle victoire obtenue par la diversité de ses comptoirs... chose que nous n'avions vu venir, si ce n'est Xavier lui-même ! :)

C'est quelques échanges plus tard que nous avons laissés les bretons, Lionel (que je n'ai guère nommé ici mais que nous avons retrouvé sur plus de la moitié de nos parties et dont les remarques et échanges étaient vraiment intéressants), et ce salon 2016 qui restera une excellente édition et une première côté nombre de jeux à venir testés (pas loin d'une dizaine).

Loin de nous arrêter en si bon chemin, nous avons ensuite rejoint l'ami Rico (et jouer à Imagine et Quadropolis ^^) puis nos pénates (et finir à 4 heures du mat' après un rapide Kumo Hogosha et un léger Blood Rage !), avant que de s'endormir, des images et des sensations ludiques plein la tête*, et une petite phrase en tête...

Trois jours, c'est court !

Dernière minute et collage de nos étiquettes... nous étions nombreux. Je crois.

Pour finir cette entrée qui doit faire 10 fois la taille prévue initialement, d'où sa division en plusieurs "morceaux", quelques mots... sérieux... pour les, je suppose, très rares lecteurs de ces articles. Si ce festival est devenu avec le temps l'un des tous premiers salons français et peut-être même européens dans le landernau ludique avec, chaque année, un succès un peu plus prégnant, une gratuité plutôt rare, 18.000 visiteurs au moins et des centaines de bénévoles qui me font dire que s'amuser, c'est du taf (sans que j'oublie la présence d'acteurs majeurs du paysage français et international), l'Alchimie ne fait pourtant, à mon sens, pas plus de bruit que cela comparé, par exemple, au PEL de tout là-haut, en bord de Seine, dans la capitale. Je parle là des médias du secteur. C'est surprenant ! Je trouve. Ce bel évènement de convivialité entre amateurs, passionnés et professionnels illumine pourtant le printemps de nombre de joueurs, entre autres, du sud... Et aujourd'hui, et bien, l'Alchimie est en danger !

Avec un prestataire locataire de surface trèèèèèèès gourmand puisqu'en position de monopole, doublant sa facture tous les douze mois, le compte n'y est plus pour l'assoc' toulousaine. Une plus grande notoriété changerait-elle la donne ? Une entrée payante rognerait-elle une part de public pourtant croissante ? Quid de l'an prochain surtout ? Les questions demeurent, mais je me dis simplement qu'il est des périples sans fin qu'on ne souhaite achever tant il reste à faire, ici et ailleurs. Aussi, pour une fois ici, voici un LIEN, si jamais le coeur et le porte-monnaie vous en disent, histoire de soutenir le futur du festival... et de vous assurer une nouvelle lecture très indigeste d'ici 360... 370 jours ! Il n'y pas de mal à s'faire du bien non... ou inversement !? :D

A l'année prochaine donc... <croise les doigts, tous !>



* mes songes furent à vrai dire envahis par un barbu orléanais, un signeur souriant, et leur table Legacy. Mais je vais mieux depuis... je consulte !

6.5.16

Pur Week-End - épisode 2


« Le jeu est un travail qu'on ne peut pratiquer si l'on a des loisirs. »

Le samedi... Après une courte nuit et une collation rapidement expédiée, nous voici de retour, entre vent et froid, dans les deux halls toulousains.

Filosofia toujours au rendez-vous, plutôt amateur du locataire du 221 bis, c'est donc vers Beyond Baker Street (2 à 4 joueurs pour 30 minutes et moins) que je dirigeais les pas de ma cohorte de trois, et cette fois-ci, Fayçal allait être notre Watson.

L'une des deux tables Filo', avec Fayçal en noir et Olivier en Orange

Toujours prévu chez Z-Man et distribué encore chez nous par les canadiens, BBS est un VRAI jeu coopératif... à l'instar d'Hanabi. Comprenez donc que personne ne peut influencer le groupe par son caractère ou sa gouaille, emportant ainsi toutes les décisions... comme dans Hanabi. Et oui, au-delà de la maison du célèbre détective, il faut s'entraider, réfléchir, échanger, et ce chacun de son côté et pour le bien commun... Hanabi ? Encore ? La réponse est "Elémentaire !" puisque BBS est clairement imprégné des mécaniques du jeu d'Antoine Bauza. Toutefois, il vous faut oublier vos feux d'artifices, car désormais, face aux dos de vos cartes, vous devez vous rappeler de leur nombre, bien sûr, mais aussi des documents (silhouette), des pistes (pas), et des indices (loupe) pouvant vous mener à la résolution de trois mystères, et ce avant Holmes : or, dès que vous fournissez un renseignement à un autre joueur, Holmes avance sur une piste dont l'issue est votre défaite. Dans le même temps, vous devez clore les trois enquêtes, chacune ayant un valeur, en y plaçant des cartes dont la somme doit exactement égaler cette valeur : si c'est une réussite, vous confirmez alors l'investigation et l'enquêteur opiomane fait un pas en arrière, vous faisant gagner quelques précieuses actions. Par ailleurs, une piste de défausse se remplit peu à peu : elle est constituée des éléments que vous estimez non justifiés pour résoudre le mystère final. Or, comme l'écrivait Doyle, « Lorsque vous avez éliminé l'impossible, ce qui reste, aussi improbable que cela paraisse, doit être la vérité." : dans cette défausse, vous devez totaliser 20 points, là encore, et à l'unité près. Si ces 4 challenges sont accomplis, Holmes avoue sa défaite et vous emménagez dans son nid à poussière.
Avec ce thème très marqué mais naturellement ancré dans la mécanique de Hanabi, bien plus que l'original lui-même d'ailleurs, les règles qui se sont ajoutées sont fluides et bien pensées, et ce ne sont pas les avatars aux atouts personnalisés (n'est ce pas Toby ?) qui vont à l'encontre de cette évidence. Le matériel lui est honnête, mais la version étant celle de démo, la qualité n'était pas forcément au rendez-vous : pour être fixé sur le sujet et bien se rendre compte du rendu final, il faudra attendre la sortie en échoppe. Reste que Beyond Baker Street est vraiment une belle surprise et son achat, là encore, sera obligatoire pour peu que vous aimiez le VRAI coopératif ! Je ne sais donc si Moriarty se cache chez Filo', ce qui est sûr, c'est que cette année, des deniers vont circuler de ma bourse à la leur. :)
Voilà, voilà. Hum ? Et la partie ? ... Et bien, comment dire ? Comme la veille, notre équipe a pu compter sur ma diligence... et échouer à un coup du but. Et comme vous avez bonne mémoire, nul doute que vous avez saisi que depuis l'ouverture du salon, je n'ai jamais su me montrer victorieux, et ce malgré des échanges féroces et une tactique à toute épreuve... La malchance alors ? En même temps, pourquoi croyiez-vous que je souhaitais la venue de Monsieur Guillaume durant ce week-end ? Hein ? Non, pas une idée ? Ce n'est pas grave, le temps qui me restait sur les lieux allaient sans doute me permettre de renverser la vapeur, et après quelques palabres et l'annonce d'un Legacy saison 2 pour 2017, il était temps pour nous de reprendre notre voyage. En voiture, donc !

Et de petites voitures, c'est bien ce dont il est question. Joliment peintes, disposées sur un pont cartonné du plus bel effet, surmontées d'un panneau publicitaire vintage affichant fièrement Gang Rush Detroit (3 à 5 joueurs pour 1 heure et moins), il n'en fallait pas plus pour arrêter notre route sur le bas côté de ce projet porté par rien moins qu'Ankama en France et CMON outre-atlantique... une décision uniquement basée sur un visuel donc ? Affirmatif... et grand bien nous en prit !

Gang Rush Detroit

Mais revenons quelques mois en arrière, à Saran, Loiret, chez les amis Florent et Karin : suite à de nombreuses demandes, insistantes, de nos hôtes, nous jouons alors au Survivant, vieux machin sorti dans les années 80, et fortement ancré dans l'univers Millerien de Mad Max. Et ce jeu à la mécanique vieillotte (comme ce mot d'ailleurs...) nous fait, contre toute attente, passer un agréable moment : engagés dans une course effrénée où les joueurs doivent TRES rapidement piloter leurs bolides sur une piste en destruction constante, le vainqueur y est le dernier "survivant" (du génie des créateurs de titre !), tous ses concurrents ayant disparu avec la piste sous leurs pneus. Au sortir de la partie, Marie et moi nous faisons la réflexion que l'objet a, malgré son âge, un bon potentiel... si quelqu'un a un jour l'idée d'en améliorer la mécanique.

J.-B. à côté de Sylvain, le créateur du jeu

Retour vers le futur... et Gang Rush Detroit. Car oui, une fois assis devant son plateau, la filiation entre les deux jeux ne fait, à nos yeux, pas l'ombre d'un doute. Pourtant, Sylvain et Henri (Mollinié), respectivement créateur et développeur, s'en dédouanent immédiatement : les deux hommes ne connaissaient rien de notre référence au moment de poser les bases de GRD, plutôt familialement lié à Mississipi Queen, un ancêtre lui aussi. Ici, donc, le thème n'est plus post-apocalyptique mais fortement ancré dans les 50's et ses films de gangsters. De même, afin de ne pas laisser un joueur en rade une fois son véhicule... poussé, carambolé, noyé, criblé ou simplement détruit, la tuile mobile de route qui existait bel et bien aux origines du projet (autre hasard) a disparu pour ne laisser qu'une cinq voies fixe :  pour sortir un max d'oseille du pays, les conducteurs, lancés à bord de lourdes bagnoles américaines, doivent donc passer en pole position la frontière entre les Etats Unis et le Canada.

A chaque tour, les joueurs lancent des dés dans un système à la King of Tokyo : on effectue 3 jets de dés où l'on conserve ceux qui nous sont utiles. Puis on retranscrit les résultats choisis sur un compteur jaugeant l'état, la vitesse et la maniabilité de notre bolide, mais aussi les tirs que vont subir nos anciens partenaires de crime. A cet effet, un magasin permet en plus d'augmenter ses capacités de nuire à autrui. Enfin, une fois le tour achevé, chacun choisit l'un des nombreux obstacles proposés, tel des policiers, des containers, des clous, ou des barrières, qu'il pose ensuite sur le pont pour gêner son truand de voisin.
Au final, quand le relai vous est passé, il vous faut décider entre foncer pied au plancher, ralentir arc-bouté sur vos freins, louvoyer une main prête à amasser les biftons éparpillés, tirer l'autre cramponnée à votre calibre 45, et percuter ou pousser de votre pare buffle étincelant (sur un autre obstacle ou dans la rivière) : aucune de vos décisions n'est anodine puisque une grande vitesse vous offre de passer le premier la frontière, mais vos poursuivants ont alors tout loisir de vous canarder et d'ainsi ramasser le fric perdu à chaque choc que votre caisse encaisse.... et l'argent, c'est la victoire et la vie ! De même, traîner permet de gentiment allumer les copains et de servir de voiture balai... à billets... mais le dernier à franchir la ligne fait aussi le choix de se dessiner une petite cible sur le front, le parrain ne supportant pas les tortues. Un choix corleonien !

Entre des règles bien huilées (de moteur) conseillant aux joueurs d'user de promesses et menaces, un matériel ankamesque qui fait furieusement penser à celui de Colt Express, des véhicules aux capacités uniques encore à venir, et quelques modes de jeu supplémentaires, ce n'est pas l'immersion ludique elle aussi puissante qui vous fera passer votre chemin. Pour ma part, je sais déjà que je vais ressortir les pinceaux pour peindre toutes ces jolies bagnoles avant qu'elles n'empruntent le pont Amabassador de Detroit et ce, malgré mon epic fail de fin de partie : mon dernier jet devait en effet être une formalité, mais un jet critique a transformé mon triomphe annoncé en pèlerinage au fin fond de l'Alaska où j'attends encore la balle qui mettra fin à ma cavale...! Et pendant ce temps là, Marie suçait... des glaces à Vancouver dans les bras du Don. Décidément, la vie (de criminel) n'est pas un long fleuve tranquille...

La... ma voiture, la verte, vient de caler sur son tremplin alors qu'elle devait finir
sur une superbe envolée par dessus les autres concurrents... Injustice flagrante !

Mais, avant de passer au jeu suivant, je voudrais faire une parenthèse, encore. C'est en fait sur ce stand d'Ankama que je pris la décision d'écrire ce que vous parcourez actuellement et c'est là que, pour moi, débuta, réellement, ce festival : Henri et Sylvain sont d'ailleurs à l'origine de ma petite pensée d'introduction. Car après quatre heures passées en leur compagnie, à jouer, deviser, rire, réfléchir et surtout écouter (Henri est "un poil" bavard mais surtout passionné et passionnant), jamais l'accouchement d'un jeu ne m'aura été autant détaillé, ni la passion pour ce travail communiquée. Et c'est ce qui me plait dans ce genre d'événements où, même si ma présence se justifie par mon envie de découvrir de futures pépites à partager entre amis, c'est de plus en plus l'échange avec les acteurs du jeu qui me passionne, me questionne, m'interpelle. Apprécier le récit de la genèse du projet. Découvrir le cheminement qui mène à ce choix de jeu. Comprendre le parcours du créateur souvent complexe mélange de déceptions, de doutes, de joies et de soulagement lorsque tout s'achève. Assimiler que fort souvent il y a un autre métier derrière, une vie, et que celle-ci en est une autre. Et toujours, en fond, invariablement ancrée dans la caboche de tous ces auteurs, la pugnacité de croire en ses idées et l'humilité, et parfois la douleur, d'accepter qu'elles soient un tant soit peu modifiées, altérées, remodelées par des développeurs ou éditeurs non moins talentueux.

Que ce soient les gens de l'officine (merci Guillaume pour tes accueils), ou Matthieu d'Epenoux et Cédric Lefebvre croisés à Orléans, Simon Le Minor et Fayçal l'année passée ici même, et donc Henri et Sylvain, mais aussi Croc et Xavier Berret pour cette édition, tous ont en commun une vision affûtée de leur milieu et de leur passion, dont tout le sel naît de la conclusion que, si elles ne sont pas forcément identiques, elles sont toutes intimement vraies et passionnantes.
Je tenais donc à remercier tous ces intervenants par ces quelques lignes, en transcrivant humblement tout ce qu'ils me font parfois ressentir.
Fin de l'aparté et "pire" moment du salon...où comment faire une transition un rien brutale. :)

En effet, il y eut ensuite V-Commandos (1 à 4 joueurs)...

Je suis ce jeu du Triton Noir et distribué par les toulousains de la Morning Family depuis quelques temps déjà, et j'hésitais à m'acheter le backerkit à 80 euros : l'Alchimie aura dissipé mes hésitations... et sauvé mes maigres économies mises en danger par les jeux précédemment visités.

V-Commandos ; on sent la passion dans les yeux de Marie,
quant à la chaise vide, c'est celle de l'anim' !

Dans ce coopératif, la mécanique n'est pas compliquée : vous jouez des soldats de la 2nde guerre mondiale, chacun avec ses capacités, au travers de missions nombreuses et variées. Grâce à vos jets de dés, vous devez gérer l'arrivée incessante de soldats allemands sur les tuiles de décor, utiliser vos armes et objets, sans oublier d'en prendre de nouveaux sur les dépouilles créées et croisées : des airs de Zombicide donc ? Clairement, mais la furtivité, principale règle introduite ici, vous permet d'agir sous couvert et renouvelle suffisamment le genre (que j'apprécie par ailleurs) pour le rendre intéressant. De plus, le thème est respecté et aidé des reportages, films et éducations que nous avons reçu, l'on s'y glisse aisément. Quant au matériel, loin de bouleverser le genre, il est... chouette. Mais alors, pourquoi cette déception vous interrogez-vous tout en luttant contre la fatigue induite par cette entrée déjà trèèèèèèèèèèèèèèèèèèès longue (mais découpée trois fois !) ? La faute à un animateur peu, voire pas, impliqué ! Entre les abandons fréquents de notre groupe, une présentation foutraque de la table, des explications à l'emporte pièce, et la comparaison avec les jolis moments passés jusque là, notre expérience de jeu y aurait finalement énormément gagné si la table s'était située dans la section "Prêt à jouer" et si nous avions potassé V-Commandos seuls : un peu dommage lorsqu'un éditeur fait l'effort d'avoir un relais pour "vendre" son produit.

Je peux toutefois comprendre qu'une certaine lassitude s'installe lors de longues journées de salon comme celle-ci : reste que je ne l'excuse pas forcément (je ne le fais pas pour moi-même) et que ni l'art, ni la manière, ne furent mis en place lors de ce passage ludique. C'est donc agacé par une partie... fadasse... que nous avons nous-même bâclé notre mission, concluant malgré notre échec que le jeu fonctionnait bien et semblait équilibré mais ne provoquait pas l'étincelle ludique recherchée : heureusement, de ce que j'en ai lu ici et là, il aura tout de même emballé d'autres joueurs durant ce week-end, louant d'ailleurs le talent de leur conteur... les veinards.

La nuit commençait alors, et avec elle le mauvais temps... et avec lui, l'arrivée de La Roulotte, fanfare devant se produire sur l'esplanade du festival... et avec elle, bin, du bruit... et avec lui, l'impossibilité d'entendre les explications de Clément, animateur chez Space Cowboys pour ce qui restera LE jeu de cette édition 2016 de l'Alchimie !

Route 666 ? Hit Ze Road ? Non ! 64 jours plus tard ! :D

C'est en effet après avoir déplacé la table vers des horizons moins bruyants que nous avons pu nous essayer à Route 666... ou Hit Ze Road (2 à 4 joueurs pour 1 heure et moins)... en fait, le titre définitif n'est plus certain, la faute à un © existant par ailleurs. Pour ma part, je lui préfère mon "64 jours plus tard" en attendant le titre définitif.

Sur une mécanique simple d'enchères et d'économies de ressources, des survivants, cinq par tête de pipe, vont devoir se tailler un chemin vers la légende en restant en vie. Ne pas crever sur le bord de la route... c'est bien ce dont il s'agit : un périple rien moins que mortel au travers d'une Amérique tout droit sortie des 50's... et, un rien, zombifiée. Le jeu, dans les standards de la société à la fusée pétaradante, est chiadé en diable du point de vue de la patte graphique et matérielle, vraiment magnifique et usée par le temps, mais ceci reste un détail. Car c'est bien sur sa mécanique que le jeu emporte la partie, et un bout d'votre cervelle si vous n'y prenez garde : prenant, résolument non coopératif, surfant sur un thème archi éculé mais rarement aussi puissant et maîtrisé, les Cowboys de l'espace tiennent, j'en mettrais mon foie à bouffer (ils ne se le sont pas faits dire deux fois), leur 3ème pépite ludique après Time Stories et Splendor.

Le jeu des 7 erreurs sur le visage de Marie :
entre V-Commandos et 64 jours plus tard.
Attention, ce n'est pas facile !

Ici, vous contez une histoire, votre histoire, celle d'un groupe de joyeux drilles traversant des Etats-Unis appétissants, pour peu que vous apparteniez à la grande famille des zombies... et ce n'est pas votre cas ! Chaque tour figure l'une des huit étapes que comptent cette odyssée. Au commencement, les joueurs doivent miser quelques précieuses ressources pour faire le premier le choix de la voie qu'ils vont emprunter : d'un nombre égal à celui des joueurs, ces chemins sont signifiés par deux lames au contenu plus ou moins rentables et de plus en plus dangereux à mesure que vous progressez dans votre récit. Puis vient le temps de l'exploration. Vos ressources, ainsi que quelques dés, vous servent alors à gérer l'événement décrit par la carte, du pillage basique à l'élimination pure et simple, à distance puis au corps à corps, de bandes puis de hordes d'ennemis souvent plus morts que vivants : la gestion de votre énergie, de vos balles, et de votre essence devient alors une vraie gageure dans ce jeu définit par Clément lui-même comme une longue agonie.

Voilà pour les règles... simples et efficaces. Et pourtant, tout cela tourne bien, très bien même. La crainte omniprésente que vous ressentez dès les premières lames révélées en est la preuve : l'immersion est immédiate. Mieux, dans notre partie, alors que le dernier encore debout se rapprochait du bout de son chemin, nous, debout aussi, mais un rien putréfiés, encouragions tous ces jets pour le voir survivre... de justesse !

5 survivants, 5 jerricans, 4 adrénalines et 2 chargeurs : Marie ira loin !

Sacré jeu que celui-là donc, évoquant un peu Time Stories par ces dés, cartes, textes et illustrations, mais définitivement cubenbois dans son mode de gestion. Il aura fait l'unanimité autour de la table, le tout renforcé par une bande son à base d'accordéon, de guitare sèche, de tambourin, et de trombone même lorsqu'il s'agissait de marquer les moments épiques de notre histoire. Croc s'est probablement procuré l'album à l'heure qu'il est ! :D

Le samedi s'achevait ainsi... et il nous restait deux heures du dimanche à mettre à profit.

C'est donc sur un jeu en libre service que notre choix s'est arrêté (ouais, encore le mien, je sais !) pour finir cette deuxième journée. Et comme nous en avions fait déjà 8 heures durant, il fallait bien en passer, pour boucler la boucle, par... Discoveries : the Journals of Lewis & Clark (2 à 4 joueurs pour 1 heure), "suite " de Lewis et Clark, tous deux parus chez les Ludonautes.

Discoveries ; les pauvres ont abandonné tout espoir de gagner et cherchent le réconfort sur les réseaux sociaux...
peine perdue !

Figurant les hommes ayant les premiers traverser le continent Nord-Américain, les joueurs doivent y explorer les territoires vierges de colons, prendre note de la faune et la flore, tout en demandant l'aide des tribus locales afin d'au plus juste cartographier un nouveau monde. J'avais déjà essayé le premier opus, une fois, sans pouvoir achever la partie, et le type de jeu m'avait ravi : il reste d'ailleurs un regret que j'espère un jour apaiser. Par contre, je ne connaissais celui-là que par média interposé et voulais à tout crin (d'poney) le chevaucher, l'impression de fell good game intimement liée au thème et au design. Et donc...

D'un côté, nous avons des dés représentant chacun un membre de l'expédition (5 par joueur) et qui associés aux cartes de tribu vous permettent de libérer des membres neutres (dés gris) mais surtout d'enrichir les actions de base, comme la traversée de montagnes et de fleuves. De l'autre, des cartes géographiques représentent les régions et la manière de les explorer, par monts et par eaux : ces régions octroient des points de victoire, et un bonus si elles vous permettent d'alterner des sets de plantes et d'animaux.
Dernier point mécanique, une fois les dés utilisés, il rejoignent une réserve : tout à chacun, à son tour et au lieu de faire un nouveau jet, peut y reconstituer son pool de afin de préparer ses futures actions.
Et l'on se prend au jeu, très rapidement... Collectionner toutes ces cartes, créer ses voies, découvrir les Amériques, commercer avec les indiens, anticiper sur les actions des ses concurrents et jouer de la réserve comme d'un soutien ou un frein, tout cela participe à rendre le jeu agréable, fluide et simple, sans qu'il devienne simpliste : car oui, il faut en griller du neurone pour maximiser les allées et venues de ses explorateurs, et plus d'une fois, l'un de nous a fait patienter ses voisins pour prendre la meilleure option parmi tant d'autres. Alors là, je sais, vous vous dîtes "Un jeu malin, simple mais où la matière grise est indispensable... les autres n'avaient aucune chance, Robin les a écrasé !" : et vous avez RAISON. C'est donc sur une victoire emportée haut la main (d'un point) que je quittais le salon, les losers sur mes talons... à peine un regard en arrière pour les graphismes magnifiques de Monsieur Vincent Dutrait (déjà coupable de ceux du jeu 2015 de ma moitié, à savoir New-York 1901). Sachant que ce jeu rejoindrait bien vite notre ludothèque, mon esprit était déjà à quelques heures plus tard.

Beaucoup plus pour vous... :)

4.5.16

Pur Week-End - épisode 1


« L'essentiel de la vie sont les êtres que l'on rencontre sur son chemin. »

Lorsque je regarde les trois jours délicieusement ludiques qui, à la vitesse d'une bourrasque de vent d'Autan, viennent de souffler sur le parc exposition de Toulouse pour son annuelle Alchimie du jeu, c'est bien la pensée qui m'habite ce jour... sans jeux de mots !

(ce pourrait aussi être "connard de portable !" étant donné que celui-ci m'a bouffé la quasi intégralité des photos prises ce week-end... :/ Merci au Bou' donc pour m'avoir refilé les siennes et illustrer un tant soit peu mon propos.)

Car oui, outre les émotions délivrées par ce salon durant quelques 20 heures, 12 bornes, 9 parties, 3 cocas et 2 sandwiches, ce sont surtout les rencontres et échanges avec les créateurs/animateurs/joueurs initiés par ces œuvres qui ont fait mon week-end.

Petite review de 3 jours, bien particuliers, donc.

Et cela commence le vendredi, vers 22, 23 heures, la faute à l'arrivée du copain Jbeu mais surtout à une descente collégiale à La Binocle, restau toujours au taquet lorsqu'il s'agit d'envoyer du pâté dans l'assiette, et pas que ! Il faut bien nourrir ses neurones avant de les griller autour de cubenbois ! Bref, c'est la panse poilue calée, la discussion amicale engagée et l'esprit retors léger que nous avons fini par débarquer, ma moitié, l'ami et moi, dans les deux grands hangars peuplés de joueurs du parc expo' de Toulouse. Côté affluence, la soirée étant bien engagée, quelques rares tables étaient encore épargnées, mais c'est par un tour, de tables donc, que nous choisîmes tout d'abord d'entamer notre réjouissante expédition.

Hall numéro 8, celui du jeu de rôles

Comme l'an dernier, entre les espaces prêts à jouer loués par les éditeurs, on trouvait les protos en test, quelques tournois, une section dédiée aux personnes ayant un ou plusieurs sens déficients, des jeux de rôle et du GN, les fézeurs de figouzes, une bourse d'échange, et l'immense étal du Passe Temps : à l'extérieur, petite nouveauté, se cachait une escape room dont l'accès nous fut interdit par la nuit, d'abord, puis le temps, ensuite. Et bien sûr, il y avait du jeu... de construction, en bois, d'extérieur, catalans, primés, classiques, coopératifs, d'aujourd'hui et de demain, bref, de quoi s'agiter les méninges, se rincer les mirettes et s'enfiler sa dose d'endorphine.

Du cubenbois, mais pour la construction

Une fois ce tour du propriétaire bouclé, en bon guide touristaqué (...), j'encourageais le trinôme à se diriger vers les avants-première, épicentre de mes bons souvenirs de l'année passée : ce sont donc les gens de Filosofia qui eurent les tous premiers le bonheur de voir nos postérieurs lustrer les chaises de leur stand. Comme douze mois plus tôt, Fayçal et sa bande, sans leurs stetsons, allaient devoir nous faire l'article... pour une partie de Pandemic : Reign of Chtulhu (2 à 4 joueurs pour 30 minutes et plus).

Pandemic : Reign of Cthulhu ; mlm©

Prévu pour la fin de l'été outre-manche chez Z-Man Games, Filo gérant la partie francophone, je dois dire que je ne m'attendais pas du tout à voir le jeu sur le salon. C'est donc ravi que j'ai commencé à écouter les explications de l'animateur (dont j'ai oublié le prénom... pardon, pardon, pardon... et hop, retrouvé... Olivier !!!) sur cette énième resucée du succès de Leacock, par Leacock, mais avec des tentacules dedans. Sur le principe, le jeu ne change d'ailleurs pas. Le monde se cantonne simplement aux villes chères à Lovecraft, les quatre virus ne sont plus qu'un immense collège de cultistes, les événements sont des reliques, les remèdes à découvrir sont devenus des portails à refermer, on prend le bus et non plus l'avion ou le charteur, et les toubibs se sont réorientés dans le journalisme, la plomberie, ou le maniement de lance chevrotines. Mais alors, quel est l'intérêt, si ce n'est pécuniaire, de cette nouvelle itération ? Simple... l'auteur a ajouté à son bébé quelques éléments accentuant sa difficulté et changeant un peu nos habitudes de vieux médecins baroudeurs.
Dans PRoC, les cultistes sont peu nombreux et ne se répandent pas lorsque leur petit colloque les rassemble à plus de trois mais, lorsqu'ils ouvrent un portail, le Grand Ancien qui en sort a souvent son "mot" à dire dans la partie. De même, si les objets, ou reliques, sont plus nombreux que les événements originels, il va en coûter de la santé mentale à votre pseudo Lara Croft en robe longue, comme lorsqu'elle souhaitera utiliser un portail pour se déplacer. Et puis il y a les shoggoths, monstres inférieurs qui - facile - les collent bien... faisant là encore doucement basculer votre esprit dans une folie rarement douce et souvent mortelle. De fait, et mis bout à bout, les moyens de perdre se sont accrus, et les potes au dieu poulpe étant bien plus nombreux et variés qu'une bête infection, le jeu apporte son lot de surprises et la rejouabilité s'y retrouve.

De notre côté, alors que nous avions les choses en main, et ce malgré quelques interruptions fayçaliennes (le bougre a initié un achat collégial d'Imagine à toute la table... il doit être sous-traitant, et couverture, pour Cocktail Game ^^), connaissant "un brin" l'original, c'est un combo qui mit fin à mon expérience, et par la même à celle de notre petite troupe : 2 cartes "Evil Stirs", l'équivalent des "Epidémies", tirées coup sur coup firent sortir un premier grand ancien doublant l'effet dévastateur de l'"Evil Stirs" avant que la dernière carte ne mettent fin à nos espoirs... et accessoirement à l'humanité... en nous privant de toute raison. Du coup, ce week-end, à défaut d'attraper un rhume, c'est Shudde M'ell qui m'a attrapé ! :/

Au final, PRoC fut une bonne expérience : entre la difficulté revue à la hausse, un thème fort, une patte graphique dans l'ambiance (le point faible de Pandémie à mon sens) et un matériel à la maquette prometteuse, le nouveau bébé de Leacock (et Yager) est suffisamment éloigné de son aîné pour justifier son achat dans quelques mois.

Sur cette certitude, l'heure tardive ayant fait fuir quelques uns de mes objectifs (les Space Cowboys sont des feignasses et "rendez-vous" leur fut donner sur leur compte FB pour le lendemain ^_<), c'est sur une table prête à jouer que J.-B. nous proposa une initiation à Deus (2 à 4 joueurs pour 1 heure et plus).

Deus ; mlm©

S'il a une très bonne réputation depuis sa sortie en 2014, celui-là ne m'avait jamais attiré par le passé, la faute à un matériel que je qualifierais de... froid, quoique joli. Jeu qualifié d'expert, il consiste à gérer un pool de cartes, enrichi de nouveaux tirages, afin de placer bâtiments et troupes sur de vastes terres inconnues et ainsi coloniser et rendre hommage à quelques dieux tutélaires. Après quelques passes d'armes finalement interrompues par la fermeture du festival, ma défaite et la victoire de notre maître semblèrent acquises. Le jeu n'en reste pas moins bon ! :) Apparemment doté d'une jolie profondeur, en partie car il laisse la part belle aux combos et possède une zone de jeu entièrement modulable, la courbe d'apprentissage doit y être conséquente malgré des règles facilement assimilables. Mon style de jeu alors ? Oui, mais probablement un de ceux que je n'achèterais pas. En effet, il y a le thème... ou plutôt non, et c'est bien là qu'est le problème : Deus n'en a pas... pas de visible en tous cas, si ce n'est sa couv' de boîte. Ni son matériel de qualité, solide et coloré, ni son environnement de jeu n'appelle au "voyage". Et aujourd'hui, cela peut faire la différence : cela la fit sur moi en tous cas.

C'est tout de même ravis de cette courte et première soirée que nous regagnâmes nos pénates, nos oreillers nous accueillant enfin lors que la quatrième heure de cette première nuit ludique sonnait.

(Je coupe ici cette entrée bien plus longue que prévue, la suite arrivera... demain ?)

3.4.16

Des souris et des hommes


« Cette leçon vaut bien un fromage sans doute. »

Le provolo... gue

Si quelqu'un m'avait dit un jour que je me recollerais aux jeux de société 20 ans plus tard... et si l'outrecuidant avait en sus rajouté que je me fendrais parfois de chroniques sur le sujet... nul doute que cet audacieux cuistre aurait pu tout aussi bien au visage me balancer "Et en plus, tu étrenneras ces billets d'humeurs ludiques par une bafouille sur une assemblée de rongeurs de capes et de crocs armés dont l'envie première est de tamponner du fion de cancrelat !"... Mais je n'ai pas d'ami voyant (et c'est bien dommage) et personne ne me tint jamais ses propos quand il aurait pourtant fallu ! Car oui, le sujet de ce premier avis de joueur, tout arbitraire et probablement injuste qu'il sera, porte bien sur un jeu avec des... souris.


C'est un long romano, c'est un bel ossau-iraty.

Mice and Mystics, de Jerry Hawthorne, est un jeu coopératif, de un à quatre joueurs, où ceux-ci incarnent donc, comme le dirait ma cousine Elvira, de mignonnes petites bêbêêêêtes. Mais ici, point de maisons à infester guidé par un flûtiste légèrement zoophile, ou de labyrinthes à explorer pour cause de boulimie fromagère prononcée. Non. Mice and Mystics est un jeu d'exploration à figurines reposant sur le "simple" principe d'un livre de scénarii guidant les minuscules héros dans des intrigues dont chaque fil devra être déroulé pour enfin atteindre le mot "Fin"... ou "A suivre". Car au château du Roi Andon, de sombres forces ont affaibli le souverain. Son fils et ses amis, confrontés au danger, n'ont alors trouvé d'échappatoire qu'en se changeant en souriceaux : las, leurs ennemis se sont "adaptés" pour les poursuivre.


Désormais; c'est au pied d'une table, sous la grille d'un égout ou sur l'édredon d'un lit moelleux que les épreuves se succèdent et que les combats font rage entre le prince Collin, ses compagnons souris, des rats, des araignées, des cafards, et un bon gros... matou qui, exceptionnellement, ne passait pas ce jour devant une caméra alors qu'il se suçait goulûment l'appendice caudal tout en faisant sur une patte le poirier en équilibre sur le rebord d'une fenêtre. C'est dommage, cela nous aurait fait une bien belle vidéo sirupeuse à diffuser sur les réseaux sociaux... mais je m'égare ! *pousse le malotrus dans le vide, un vilain sourire à peine dissimulé*

Je disais donc... Tel un Brisby abreuvé au miruvor, ne vous reste plus qu'à endosser vos habits de mage, vos défroques de voleur ou votre tunique d'archer pour aller prêter mains... ou pattes fortes au prince à la fine moustache, et enfin chasser les puissances noires et poilues du château.

La mâcon... ique

Il va sans dire qu'une fois la boîte à peine entrouverte, vos yeux d'enfants ne cesseront de s'extasier sur la qualité du matériel de ce jeu. Entre les tuiles figurant les intérieurs de la grande demeure, les dés originaux d'arcs, d'étoiles, d'estocs et de boucliers parés, les nombreuses cartes de compétences, d'objets et de rencontres aux choix de couleurs judicieux, les fiches de personnages détaillant par le glaive et l'esprit vos porteuses de ratiches tranchantes, sans oublier les figurines les représentant ainsi que leurs vingtaine de némésis finement détaillées, ce ne sont pas le manuel de règles richement illustré et le livre de contes aussi épais qu'intrigant qui vous feront regretter votre achat. Non, décidemment, Mice and Mystics en a dans l'carton et justifie son tarif, déjà sur ce point !

Une seule solution s'impose alors à vous : sortir de l'imposante souricière tout ce riche contenu et vite vous emparer d'un héros aux feuilles pointues pour enfin ouvrir le recueil d'histoires, et en ses pages commencer une nouvelle aventure.

Car c'est via un scénario que se pose en effet les bases d'une partie : but à atteindre, compte à rebours pour y parvenir, tuiles à utiliser, nombre de chapitres à ne pas dépasser, règles parfois particulières, souris indispensables au récit, et ennemis à même de les occire, vont s'y dévoiler à mesure que les joueurs progressent dans leur périple, tout cela au travers d'explications techniques ou de textes d'ambiance lus et décortiqués par un dévoué lecteur.

Forts de ces éclaircissements, les joueurs choisissent leur personnage parmi l'un de six possibles. Mage, guerrier, voleur, prêtre, archer, ou meneur, chacun possède ses attributs (combat, défense, savoir et déplacement), ses talents uniques, ses compétences et son équipement de départ, fidèles aux canons littéraires et rôlistiques de l'héroic fantasy. Ne reste plus qu'à placer son alter ego sur la première salle, à lire l'introduction mettant en scène tous les protagonistes, et à découvrir via une carte Rencontre quels sont les obstacles à marteler de ses petits poings ou de sa grosse massue pour accéder à la pièce suivante.

Toutes les figurines possèdent une carte d'initiative dont le tirage détermine l'ordre de jeu dès qu’une nouvelle tuile est explorée. Une fois votre tour venu, ou celui de votre adversaire, vous pouvez alors agir : si vos ennemis sont limités à un déplacement et une attaque, vos souris, elles, peuvent délaisser le bourre-museau habituel pour lui préférer un deuxième mouvement, une fouille pour améliorer l'ordinaire et dégotter le bâton à rôtir les méchants harpions qui va bien, la récupération pour oublier quelques statuts négatifs tel l'étourdissement et l'abus de fromage moisi, ou l'ouverture d'une nouvelle salle pleine de mystère pour peu que l'actuelle soit nettoyée de toute présence ennemie. Mais les petiotes ont aussi la capacité d'accomplir des actions libres comme le partage de matériel avec une copine proche, l'équipement d'une nouvelle pièce pimpante et clinquante, ou la montée de niveau.

Outre les cartes (Objets, Rencontres et Initiative), Mice and Mystics se joue aussi aux dés. Le combat, la fouille et l'utilisation de certaines compétences, reposent sur leur utilisation, même si, ici, les chiffres ont laissé place à d'étranges faces. En effet, si lors d'un assaut, on compare le nombre d'épées tirées ou d'arcs tendus de l'assaillant aux boucliers levés du défenseur pour déterminer combien de points de vie ce dernier perd, sur le reste, ce sont les petites étoiles qui signalent la réussite ou l'échec d'une action. Une mécanique simple, efficace, rapide mais aussi sujette à dilemme car tout serait bien trop simple sans le pêché mignon de tout ce petit monde. Le fromaaaaage !

Cette dernière face est la principale source de joie et de frustration du joueur. Lorsque vos preux lancent les dés, les claquos représentent l'expérience nécessaire à la progression de la petite troupe ainsi que la possibilité pour celle-ci d'activer certaines de ses compétences dévastatrices. A contrario, si les calendos apparaissant sur les jets de vos diaboliques rivaux, c'est du temps qui vous échappe... inexorablement... risquant de faire s'écouler le dernier grain du sablier, et de signifier rien moins que la fin de l'aventure. Au bout du bout, quand le dernier ennemi, ou allié d'ailleurs, est tombé, il est temps de faire ses choix. Si l'expérience est jouée comme un one-shot, rien n'empêche de la tenter à nouveau, avec de nouvelles cartes, de nouveaux objets, de nouvelles souris, voire de nouveaux joueurs. On peut aussi choisir d'en découvrir une nouvelle... d'expérience, dans le livret ou sur la toile. Mais il est aussi possible de poursuivre l'histoire : en adoptant cette solution, vous conservez d'un scénario à l'autre vos compétences et un objet unique en plus de votre équipement de départ. Des éléments cruciaux afin de grignoter tout entière la première quête "Chagrin et Souvenir" que nous offre là Jerry Hawthorne.

L'avis...ronnais

Autant le dire de suite, j'ai tout d'abord eu de gros doutes quant au bien fondé de l'achat de ce jeu et, jusqu'à l'ouverture de la boîte, je n'étais pas tout à fait sûr que l'idée soit celle du siècle, pas plus que celle du jour en fait.

Initialement, Marie et moi en cherchions un de type coopératif, jouable à deux, avec de l'expérience et de l'immersion, une proximité avec le jeu de rôle et par conséquent, un poil typé thématiquement. Pas si facile que cela, même en grattant un peu, au milieu... ludique. Je connaissais bien sûr Mice and Mystics de nom et de réputation, mais les souris et l'aspect enfantin de l'univers me bloquaient carrément, voyant assez mal comment marier Bernard et Bianca avec un vieil homme acariâtre qui n'veut pas qu'on emprunte son pont : du coup, j'en étais à lorgner sur du jeu de cartes contenant justement des ptits bonhommes à pieds poilus ou même du gars à la vêture d'ébène et à la voix de rogomme. Ce sont finalement des vidéos puis le conseil d'un vendeur qui me firent craquer : et par une nuit d'automne toulousaine, tandis que le vent d'autan agaçait nos frondaisons, nous sortîmes enfin de chez notre boutiquier préféré, la Communauté du Livarot sous l'bras. Et grand bien nous en fit tant cette boîte et son contenu répondirent à nos nombreuses attentes !

Un jeu coopératif donc ? C'en est indubitablement un. Du plaisir solitaire jusqu'à celui de quatre joueurs, il permet d'y endosser un rôle unique ou multiple selon les besoins du scénario. Il est aussi de ceux dont on doit se méfier : à l'inverse d'un Hanabi qui nous ramène à la substantifique moelle du genre, un participant peut ici facilement prendre le pas sur l'ensemble du groupe et phagocyter paroles et décisions au détriment de ses camarades.

Et le loisir immersif ? Par son matériel mais surtout son écriture et ses phases de narration plongeant immédiatement le joueur dans son... animal, Mice and Mystics excelle dans le domaine. Ainsi, le thème est très présent tout au long des onze histoires se succédant dans cette fresque souristique, et bien vite, dans nos esprits, les murs des profondeurs du château se dressent, les meubles s'élèvent, le petit devient gigantesque et nos rongeurs prennent âme et vie. L'expérience acquise par les mulots moyenâgeux en mode campagne n'y est évidemment qu'un atout de plus. Une vraie belle réussite...
...dès lors, il est vrai, que l'on passe le gros écueil du jeu. Ses règles. Non, en fait, ce ne sont pas ses règles mais leur mise en page qui pose problème. Pourtant simples, elles sont aussi riches et s'étalent au travers des 20 pages du livret, mais se croisant et s'entrecroisant. Une vraie Ratatouille. Du coup, à moins de posséder un esprit analytique de haute volée, ce que visiblement notre couple ne semble avoir en catalogue, il n'est pas rare lors des premières parties de rechercher un point de règles pour savoir comment traverser une rigole, puis d'encore revenir au livret pour se rappeler comment placer les ennemis, comment obtenir les fromages, que faire de son inventaire, etc. au risque d'en perdre le fil, mais surtout l'ambiance. Un conseil. Dans ces cas-là, ne sortez pas de l'aventure ! Improvisez une règle pour achever la partie, mais surtout ne fermez pas votre imaginaire. De notre côté, je pense qu'il aura fallu 7 parties pour enfin maîtriser le petit Livre des Lois. Mais ensuite, quel pied de progresser, entre danger et adversité, sur un système tout de même bien huilé.

Ne reste que le plaisir progressif alors? C'est encore, une réussite de ce point de vue, et pas uniquement pour les niveaux qu'acquièrent peu à peu vos souris si vous choisissez de vous lancer dans la quête entière. Bien sûr, il est toujours agréable d'obtenir une nouvelle compétence ou un nouvel objet pour ressentir la montée en puissance de vos poilus préférés, et cela relève aussi de l'immersion du rôle que de voir son souriceau "grandir". Mais l'aspect de progression vient davantage du sentiment que chaque partie vous oppose de vrais challenges : les méandres du scénario bien sûr, le hasard lié aux tirages de cartes et de dés ensuite, et le temps enfin, ultime outrage du jeu, et rouage le plus complexe à apprivoiser. Votre premier essai scénaristique relève alors de l'adaptation, de la surprise aux larmes parfois... puis, avec les échecs, et ils ne sont pas rares, viennent la réflexion, l'anticipation puis la préparation de votre sortie suivante. Quelles associations de talent feront mouche le plus aisément sur les obstacles du moment ? Si je laisse ce personnage trop souvent de côté, ne sera-t-il pas trop faible quand je voudrais l'utiliser ? Comment contrarier le cours du sable qui s'écoule sur ce récit précis ? De quelle manière accentuer ses succès pas si hasardeux que cela quand on s'y attarde ?... Quelques questions parmi tant d'autres qui font de chaque essai un vrai plaisir et de chaque victoire un réel moment de joie.


Au final, en misant sur l'aventure avec ses explorations et ses tristes rencontres, le fantastique avec sa magie explosive et ses combats haletants, sans oublier l'enfance avec ses contes pour dormir et ses légendes à écrire, le jeu n'oublie pas d'y associer des règles simples et agréables pour plonger un peu plus les joueurs dans un thème riche et prégnant.

Une seule conclusion s'impose. Mice and Mystics, ça rock fort !